Que serions-nous sans les oiseaux, sans leurs chants, leurs vols, leurs présences, ces présences qui font continûment l'aller-retour terre/ciel et animent nos paysages de leur grâce ailée ? C’est sans doute la littérature qui nous offre le plus grand nombre d’œuvres consacrées aux oiseaux, art dans lequel la gente ailée tient une place importante. Au XIIe et XIIIe siècles, plusieurs héros du « Roman de Renart » étaient des oiseaux. Il s’agissait surtout de Tiécelin le corbeau, de Chanteclerc le coq, également de Petitpas le paon et de Droïn le moineau. Les poètes de la Renaissance virent surtout dans les oiseaux des êtres gracieux et pour cette raison les ont célébrés dans leurs œuvres : dans son « Eglogue au roi sous les noms de Pan et de Robin » (1538), Clément Marot parle de l’arondelle (hirondelle), de la pye, du geay, du chardonnets, des serins, pinsons, lynottes et sansonnets qui sont de nos jours encore les résidents de nos campagnes. En 1565, Rémy Belleau compose un poème à la gloire du rossignol : « Le gentil rossignolet, doucelet…, de même que Ronsard ne les oublie pas dans sa « Franciade ».
Au XVIIe siècle, quelques auteurs, et non des moindres, leur ont dédié des pages célèbres. Citons La Fontaine qui écrivit plusieurs fables qui mettent en scène des oiseaux comme « L’aigle et la pie », « Le corbeau voulant imiter l’aigle », « Le faucon et le chapon », « L’hirondelle et les petits oiseaux », « Le milan et le rossignol », ainsi que d’autres où l’oiseau donne la réplique à un autre animal, ainsi dans « Le corbeau et le renard », l’une des plus connues.
Madame de Sévigné a fait allusion à maintes reprises aux oiseaux dans ses lettres à sa fille madame de Grignan. Chateaubriand dans ses « Mémoires » évoque la souvenir prégnant de la grive dans le parc de Combourg, qui deviendra sa madeleine, puisque le simple fait de l’entendre le ramenait d’emblée en ce lieu de son enfance. Puis, chez Lamartine, dans son « Ode au rossignol » :
Ah ! ta voix touchante ou sublime
Est trop pure en ce bas lieu !
Cette musique qui t’anime
Est un instinct qui monte à Dieu !
Tes gazouillements, ton murmure,
Sont un mélange harmonieux
Des plus doux bruits de la nature,
Des plus vagues soupirs des cieux !
Ta voix, qui peut-être s’ignore,
Est la voix du bleu firmament,
De l’arbre, de l’antre sonore,
Du vallon sous l’ombre dormant !
Puis chez Théophile Gautier dans « Ce que disent les hirondelles », chez François Coppée avec « La mort des oiseaux » :
Le soir, au coin du feu, j’ai pensé bien des fois,
A la mort d’un oiseau, quelque part, dans les bois,
Pendant les tristes jours de l’hiver monotone
Les pauvres nids déserts, les nids qu’on abandonne,
Se balancent au vent sur le ciel gris de fer.
Oh ! comme les oiseaux doivent mourir l’hiver !
Pourtant lorsque viendra le temps des violettes,
Nous ne trouverons pas leurs délicats squelettes.
Dans le gazon d’avril où nous irons courir.
Est-ce que les oiseaux se cachent pour mourir ?
Une œuvre, qui leur est spécialement dévolue « L’oiseau » de Michelet, est frappante par son lyrisme et son exactitude et prouve que l’écrivain les observa avec attention et sympathie. Les oiseaux n’ont pas davantage été absents de notre poésie contemporaine. Jacques Prévert les chante à plusieurs reprises et les aborde de façon charmante dans « Pour faire le portrait d’un oiseau». Du rouge-gorge « petit luthier des campagnes », à l’alouette « extrême braise du ciel et première ardeur du jour », ils sont nommés et décrits avec délicatesse dans l’œuvre poétique de René Char. Quant à Saint-John Perse, prix Nobel de littérature en 1960, il l’a pris pour thème de son recueil « L’ordre des oiseaux », « de tous nos consanguins le plus ardent à vivre » avec des illustrations de Georges Braque :
"Oiseaux, et qu’une longue affinité tient aux confins de l’homme… Les voici, pour l’action, armés comme filles de l’esprit. Les voici pour la transe et l’avant-création, plus nocturnes qu’à l’homme la grande nuit du songe clair où s’exerce la logique du songe.
Dans la maturité d’un texte immense en voie toujours de formation, ils ont mûri comme des fruits, ou mieux comme des mots : à même la sève et la substance originelle. Et bien sont-ils comme des mots sous leur charge magique : noyaux de force et d’action, foyers d’éclairs et d’émissions, portant au loin l’initiative et la prémonition.
Sur la page blanche aux marges infinies, l’espace qu’ils mesurent n’est plus qu’incantation. Ils sont, comme dans le mètre, quantités syllabiques. Et procédant, comme les mots, de lointaine ascendance, ils perdent, comme les mots, leur sens à la limite de la félicité."
Oiseaux VIII
Ainsi, au cours des âges, la tradition populaire, les poètes, les artistes, ont-ils célébré les oiseaux chacun à leur façon mais, force est de reconnaître, que ceux-ci, grâce à leur incontestable charme, l’ont été avec toute la ferveur, l’élégance, la finesse, l’aménité qu’ils méritent.
Pour consulter les articles consacrés aux oiseaux, cliquer sur leurs titres :
L'oiseau dans le folklore français
Et pour prendre connaissance de ceux de la rubrique CULTURE, cliquer ICI