Descendons un peu plus bas
dans le silence qui touche aux origines.
La vérité est au-delà de la frontière des ombres.
Ni ombre, ni lumière vraiment,
mais une sorte de paix, une eau dormante
épargnée par le temps.
Suis-je encore vivante ? Je ne sais,
tant je vis ton absence
comme une terrible éternité.
Un jour, je fus ravie hors de ma propre conscience.
Je ne souffrais plus du simple poids des choses.
J’étais au seuil d’un autre monde
et me dévêtais de mon linceul d’humanité.
Que mon pas était léger !
Tout, dans le sens nécessaire, allait immuable
et je te cherchais en un pays de collines et de frangipaniers.
Quel écho me rendra ton appel et ta voix ?
Est-ce en mon âme que tu t’es égaré,
en ma mémoire que tu chemines fidèlement ?
Cette nuit, le jardin s’est refermé sur mon chagrin.
Bien que nous soyons en été,
mon cœur, de son hiver, est resté le prisonnier.
Combien de jours, de semaines, sans ton amour ?
Dans ce parc, tu m’as avoué
qu’il te plaisait de méditer,
aussi est-ce ton ombre improbable
que je suis venue guetter.
Tout à l’heure, il faisait clair,
il y avait là des enfants, des fleurs,
des bosquets, des marchands.
Me serais-je endormie ?
Sur quel aveu à te dire,
sur quelle peine à te confier ?
Pousse lentement la porte du jardin,
que ton pas s’inscrive,
oui, ton pas sans le mien,
sur la terre humide encore de la nuit,
arrête-toi, je te rejoins.
Quelle attente, quel souvenir lointain, un instant te retient ?
Mon absent, dans l’ombre révélatrice, reviens-moi, je t’en prie.
Armelle BARGUILLET HAUTELOIRE ( extraits de « Profil de la Nuit » )
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