La France a fait entrer Simone Veil au Panthéon en ce dimanche 1er juillet 2018 en compagnie de son époux Antoine dont il était inenvisageable qu'elle soit séparée dans la mort. Cette femme méritait ces honneurs qu'un discours un peu ampoulé du président Macron ont rendu ternes et ennuyeux un long moment. Mais la musique et l'hommage de la foule, le recueillement et l'émotion perceptibles lui ont redonné cette humanité que Simone Veil incarnait si bien, avec son regard bleu que voilait en permanence une insondable tristesse et que la beauté de son visage très classique rendait à la fois proche et majestueuse.
Simone Veil avait une hauteur et une simplicité naturelles, elle était la femme dans l'expression la plus noble du terme. A 16 ans, alors qu'elle venait juste de passer son baccalauréat, elle et sa famille étaient arrêtés par la Gestapo et jetés dans des trains qui les conduiraient en Lituanie pour son père et son frère - qui n'en reviendront pas - et au camp d'Auschwitz-Birkenau pour sa mère, elle-même et sa soeur Madeleine. Simone et Madeleine rentreront de déportation alors que madame Jacob sera emportée par le typhus. Aussitôt regagné Paris, la jeune fille s'inscrit à Sciences-Po et à la Faculté de droit pour devenir avocate. C'est durant ses études qu'elle rencontre aux sports d'hiver un jeune homme qui se prépare à une carrière d'inspecteur des finances et l'épouse en 1946. Ils formeront un couple qui affrontera le meilleur et le pire avec détermination et amour. En 1952, Simone perd sa soeur Madeleine et son jeune enfant, tous deux tués dans un accident de voiture, douleur d'autant plus cruelle pour la jeune femme que Madeleine était la seule personne avec laquelle elle avait partagé l'expérience de la déportation. Mais la vie continue et trois fils vont naître dont l'un Claude Nicolas, médecin, mourra en 2002 d'une crise cardiaque. Nouvelle épreuve auquel le couple fera face avec son courage habituel.
Désormais magistrate, Simone entre dans le gouvernement de Jacques Chirac sous la présidence de Valéry Giscard d'Estaing comme ministre de la santé chargée de défendre la loi pour l'avortement médicalisé devant un parlement composé de 95% d'hommes, loi qui allait permettre à de nombreuses femmes, en situation de détresse, d'avoir recours à ce qu'elles n'envisageaient alors que dans des cas extrêmes. D'ailleurs Simone Veil s'opposera toujours à la banalisation de l'avortement. Puis elle sera la première femme à présider le Parlement européen et la cinquième à entrer à l'Académie française le 18 mars 2010. Quel parcours pour celle qui avait été embarquée par la Gestapo dans les camps de la mort ... Oui, quelle revanche sur la vie et quelle leçon de dignité et de courage ! Simone Veil était cela et l'incarne désormais pour l'éternité : une femme debout.
Armelle BARGUILLET HAUTELOIRE
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