Humeur de Juin

Chaque saison a cela de précieux qu'elle apporte avec elle ses singularités, si bien que nos préoccupations changent à l'égal de nos paysages et de nos humeurs.

Il brille, le sauvage Été,
La poitrine pleine de roses.
Il brûle tout, hommes et choses,
Dans sa placide cruauté.

Il met le désir effronté
Sur les jeunes lèvres décloses ;
Il brille, le sauvage Été,
La poitrine pleine de roses.

Roi superbe, il plane irrité
Dans des splendeurs d'apothéoses
Sur les horizons grandioses ;
Fauve dans la blanche clarté,
Il brille, le sauvage Été.

                                         
Théodore de Banville   (1823 - 1891)

Comment décrire ce mois des roses et des coquelicots qui nous introduit dans le flamboyant été ? Du printemps, il n'a déjà plus les teintes juvéniles et les floraisons évanescentes ; de l'été, pas encore les chaleurs accablantes et les parfums capiteux, mais les jours s'y alanguissent, les attentes s'y font impatientes, les crépuscules fatals. On l'aime d'être le passeur entre deux rives, de nous conduire au solstice à pas de géant, de clore le calendrier des lycéens et des étudiants. Avec lui se boucle chaque année une époque, un temps. Aussi est-ce un mois qui compte, ne serait-ce que parce qu'inévitablement il nous oblige à des bilans. Bilan physique, intellectuel, moral, tout y passe : suis-je en bonne condition pour affronter l'été ? Où mes pas me mèneront-ils à la rentrée ? Demain, pour les vacances du bel azur, quel projet de voyage, quelles velléités d'évasion ?

Oui, on apprécie le mois de juin pour les interrogations qu'il suscite, les lumières qu'il dispense, les doutes - parfois même les craintes - qu'il provoque, les promesses qu'il suggère. On l'aime d'être à l'extrême, avec son jour le plus long et ses ténèbres les plus courtes. Ainsi le considère-t-on volontiers comme joyeux et insensé, dispendieux et provocateur. Et, il est vrai qu'en juin, il nous plaît de tout promettre et de tout espérer. Dormir, se reposer paraissent indécents. Juin, c'est l'obligation de vivre impérieusement, de ne point se contraindre, c'est déjà l'avant-goût des jubilations de juillet et des prodigalités d'août, avant que le sage septembre ne nous prépare aux retenues de l'automne et aux gravités de l'hiver.

Mon coeur, rappelle-toi

la beauté, la vigueur de nos jeunes saisons,

quand l'alouette chantait au-dessus des moissons,

que la source jaillissait dans un éclat de jaspe.

La maison se laurait de vignes et de lierre

et les roses trémières rosissaient son fronton.

Armelle Barguillet Hauteloire     Extraits du "Chant de Malabata"*

Fête de la musique, feux de la Saint-Jean, Juin traverse le temps  en apothéose. Il est le point d'orgue d'une année qui nous façonne selon le rythme compulsif de ses saisons et qui, soudain, semble lâcher prise. Juin des rendez-vous donnés ou manqués, des attentes fébriles, des fiévreux crépuscules, des roses aurores et des lueurs veillées à l'avant-poste estival.

* Armelle Barguillet Hauteloire - "Profil de la Nuit"
 

Armelle BARGUILLET HAUTELOIRE
 

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Comments

[Prêtre isabelle]

Encore un mot , Armelle, vous avez le don de présenter des photographies magnifiques, quand ce ne sont pas des tableaux. L'esthétisme chez Vous est naturel comme votre respiration.
Le Beau, je le sais, est votre patrie.
Je voulais vous dire cela, mais je ne peux vous complimenter sans me complimenter aussi, je vous souris en écrivant ces mots, car la Beauté est pour moi consolation et bonheur, qu'elle soit artistique ou naturelle, mais la Nature n'est elle pas de l'Art? Et nous connaissons le nom de l'Artiste.
Les champs de coquelicot, pour moi, c'est le Tarn, et sa si belle campagne, et mes pas dans les pas de ceux que j'aimais, les roses, c'est partout un chant d'ivresse et de délicatesse que je respire et respire sans jamais me lasser, et que je contemple comme on contemple l'éphémère merveilleux'.

Isabelle

[armelle]

Mon mois préféré. La fin du printemps dans toute sa splenduer et le début de l'été dans sa douce chaleur.

[Prêtre isabelle]

Je viens de relire votre poème, et je me revois comme vous , petite, en ce mois de juin.
Pour les enfants, ce mois était, et reste, le symbole du bonheur, car la plage des vacances qui commençaient nous semblait alors infinie, et la joie qui nous envahissait était alors une joie indicible.
Je suis comme vous, Armelle, je vois les saisons comme des univers, et ce changement m'enchante toujours, car chaque saison a une âme.
Isabelle

[Isabelle Prêtre]

Vous avez présenté deux poèmes, et le vôtre est mon préféré.
J'ai senti le parfum des roses, contemplé les coquelicots, communié à l'éveil de la somptueuse nature.
Les feux de la Saint Jean, nous les sautions ensemble, mon frère et moi, jusqu'en 2012!
La musique dont vous parlez, il la composait avec son talent fou.
Les lumières et les couleurs dont vous parlez sont sur ses somptueux tableaux.
Oui , il est né le 4 juin, et ce jour là fut et sera à jamais le beau jour de ma vie.
Le soleil au plus haut, c'était lui, cet être solaire qui a réjoui ici bas tant d'esprits et de cœurs.
Aujourd'hui qu'il habite au ciel je vois le printemps renaître chaque année, et je lève ma coupe vers lui pour célébrer la Vie, comme je le ferai un jour quand je serai assise avec lui à la table de Dieu.
Souvenez vous de mon poème commençant ainsi:
Je voudrais , moi aussi, comme les fleurs chaque année
renaître à la vie, sous un nouveau soleil.

Je renaîtrai à la vie, sous un nouveau soleil, et Jean-Reynald sera à mes côtés, et le printemps durera une éternité.
Juin est un mois divin, il est mon mois préféré, car tout commence et recommence.
Et tout recommencera.
Isabelle

[armelle]

Juin est un mois que j'ai toujours aimé. Il annonce l'été et il annonçait les vacances pour les enfants que nous étions alors. Les jours sont longs, les atmosphères embaumées par les innombrables fleurs, tout est à l'unisson de ce temps long. Oui, votre poème était une salutation à la beauté de cette nature jubilatoire. Cette renaissance touche le physique et davantage encore le moral et notre constant souci d'espérance.

[armelle]

Certes, nos chers disparus nous ont quittés, mais ils ne cessent, avec discrétion, de nous accompagner.

[Loic]

Le charme de nos saisons est l'atout majeur de notre climat tempere.