Les éditions Irezumi ont eu l’intelligente initiative de créer une collection qui a pour ambition d’aborder, sous diverses formes, « Les expériences de vie ». L’ouvrage d’Edmée de Xhavée « Journal d’une Verviétoise des Boulevards », le troisième publié par cette maison a pour objet de nous conter, d’une plume alerte et précise, le vécu d’une grand-mère paternelle, la charmante Suzanne Houben, plus souvent appelée le petit Zon, née en 1893 et décédée en 1943 à l’âge de 50 ans. Une vie qui se déroule en grande partie dans le lieu familial de Verviers, en Belgique, en ces années agitées par deux terribles guerres. Ce travail lui a été inspiré par le journal que son aïeule s’était appliquée à rédiger de 1908 à 1943, journal où elle retrace avec simplicité une existence quotidienne tressée étroitement avec les grands événements de l’Histoire.
Cette évocation est un pur enchantement. Toute une époque surgit de ce canevas serré où la douce et primesautière jeune fille se fiance, se marie, s’installe momentanément en Uruguay avec son époux, devient mère d’un unique fils, le père d’Edmée, puis revient au pays natal pour y vivre la seconde guerre où son mari reprend du service comme officier et sera fait prisonnier par les Allemands, avant de la rejoindre très vite dans l’éternité. (1943 –1944)
Jeune fille attachante, femme verticale, Suzanne était de celles qui font face, savent composer avec la réalité et les épreuves, coudre à petits points une vie sage et probe, favoriser les amitiés fidèles, élever avec tendresse et fermeté son enfant, entretenir en usant de mille intentions les liens familiaux et apprécier tout ce qui relève de la culture, une culture favorisée par de nombreux voyages. En somme une vie lumineuse au cœur d’une bourgeoisie aimablement installée, sans faux pas, conduite avec grâce et droiture, texte que l’on partage avec d’autant plus de plaisir que l’on y contemple avec émotion un passé qui a la matité de ces photos anciennes à peine jaunies par le temps. Immersion dans ces existences qui nous ont devancés et ont contribué à nous faire ce que nous sommes, passé qui fortifie notre présent et coopère à sa pérennité en fixant, dans une actualité permanente, les grandes heures de jadis. A coup sûr, un beau livre.
Armelle BARGUILLET HAUTELOIRE
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