Un vampire pour guide
Un recueil de nouvelles brèves qui racontent, en n’allant qu’à l’essentiel, des petites choses du quotidien qui finissent par déterminer l’existence de chacun. Un vampire, certainement un personnage réel ou virtuel, qui aurait eu une influence déterminante sur la vie de la narratrice.
Le vampire de Clichy
de Véronique Janzyk
« La dernière nuit de l’an dernier, j’ai été mordue à la gorge par un vampire ». Cette morsure a bizarrement engendrée des rencontres « particulières » que l’auteure raconte dans ce recueil de vingt-trois textes que l’on peut présenter comme autant de nouvelles construites avec des phrases courtes, souvent même très courtes, qui toutefois n’accélèrent jamais le texte, lui conservant toujours le rythme approprié à l’intrigue et à l’intensité que Véronique Janzyk cherche à lui donner. Des phrases dépouillées contenant seulement l’essentiel, l’essentiel c’est toutes les petites choses qu’on ne remarque pas forcément mais qui constituent le quotidien de la vie et qui finissent par déterminer notre l’existence. L’essentiel, ce sont aussi les mots car l’auteure a fait un vrai travail sur le langage choisissant avec beaucoup d’attention le terme le plus juste, le mieux approprié pour décrire les situations que le vampire lui impose tout en les revendiquant. L’essentiel, c’est aussi le corps qui fait l’objet de plusieurs textes, le corps qu’on exhibe, le corps réceptacle de la souffrance, le corps que le vampire mord.
J’ai bien aimé le procédé très adroit dont Véronique use afin d’introduire ses nouvelles qui ne sont pas sans rappeler celles de son précédent recueil, la mise en scène d’un vampire qui serait comme un guide de sa vie mais aussi l’inspirateur de ses récits. Un être imaginaire qui aurait une double mission : inspirateur de la vie que l’auteure raconte et inspirateur des récits, un rôle dans l’histoire racontée et un rôle dans la rédaction de cette histoire. Mais si ce vampire est tellement impliqué dans la vie de la narratrice, une question se pose inéluctablement : qui est ce vampire ? Ou qui se cache derrière ce vampire ? Certains textes portent peut-être des indices, ceux notamment qui évoquent les grandes faillites de notre société, les monstres inhumains indignes de la vie qui leur a été donnée, les violences cruelles et inutiles, les douleurs et les souffrances injustes… La narratrice semble supporter de plus en plus mal le comportement de ses congénères et le vampire est celui qui intervient pour marquer une rupture, un changement, elle l’en remercie d’ailleurs dans le texte liminaire : « … je l’ai croisé, et qu’il en soit ici remercié ». Le vampire pourrait être celui qui, avec la nouvelle année, apporte une nouvelle résolution, une autre façon de voir le monde et ses misères, une autre appréhension de la vie et de ses malheurs.
Les vampires ne sont peut-être pas tous des monstres !
Denis BILLAMBOZ
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