Dans ce charmant roman, l’auteur livre une véritable leçon de vie en commun à travers les relations qu’une brave femme, un peu enquiquineuse toutefois, elle en convient elle-même, entretient avec sa famille et ses amis. Un texte plein de fraîcheur et de délicatesse.
Comment apprendre à s’aimer
Motoya Yukiko (1979 - ….)
Motoya Yukiko a fondé une troupe de théâtre pour laquelle elle écrit et met en scène des textes et son roman est fortement marqué par cette formation dans le monde du spectacle. L’intrigue est construite comme un opéra en plusieurs actes évoquant des temps différents dans l’histoire de l’héroïne, même si le nombre d’actes est un peu trop élevé pour un opéra. Des temps qui évoquent les âges de Linde, la femme autour de laquelle l’intrigue se déroule, l’adolescence, les fiançailles, l’effritement du couple, la rencontre avec celui qui pourrait remplacer le mari, le retour à la petite enfance pour comprendre la complexité du personnage, le début de la vieillesse, l’achèvement d’un parcours, le résultat d’une vie quelque peu ratée.
Chacune de ces époques est illustrée, comme au théâtre ou à l’opéra, par une scène, une partie de bowling, un repas (trois fois), un caprice à la maternelle et une embrouille avec un livreur. Ce roman pourrait être adapté au théâtre d’autant plus que l’auteur décrit les différentes scènes avec une grande minutie, soignant les moindres détails du décor et disséquant les plus petits travers comportementaux des différents acteurs du roman.
A travers cette histoire, Motoya Yukiko cherche à nous montrer que nos difficultés relationnelles proviennent le plus souvent de petits agacements, de vétilles, montées en épingle et qu’il ne suffirait que d’un brin de tolérance et de compréhension pour que tout se passe mieux entre les époux et les amis. Linde s’est séparée de son mari, elle subit ses amis plus qu’elle ne les apprécie, elle se chicane régulièrement avec les livreurs et les commerçants, c’est une brave femme mais aussi une enquiquineuse qui gagnerait à améliorer son comportement, elle le sait et s’énerve de ne pas le faire.
« A une époque, elle était convaincue qu’un jour forcément elle rencontrerait une vraie amitié, mais voilà bien longtemps qu’elle avait abandonné cette idée. Elle ne connaîtrait jamais ce genre d’amitié fascinante. Ces pitoyables êtres devant elles pensaient certainement la même chose qu’elle ». Une petite leçon de vie en commun qui dit qu’il faut savoir tolérer certains travers pour parvenir à vivre en bonne harmonie.
Ce charmant roman, plein de délicatesse nippone, appartient à la littérature japonaise actuelle, plus orientée vers l’Occident que vers les traditions ancestrales. Pour preuve je préciserai que plusieurs personnages portent un prénom occidental, ainsi : Joe, Katarina, Tyler, Sue et que celui de l’héroïne Linde est tiré du titre d’une sonate de Schubert.
Denis BILLAMBOZ
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