François aime les animaux mais son père est tueur aux abattoirs de la petite ville et il doit bientôt assurer la succession. Un drame cruel, un piège dont il faudra bien qu’il sorte d’une façon ou d’une autre. Peut-être que la poésie l’aidera ?
Les liens du sang
Errol Henrot (1982 - ….)
Jeune garçon dans une petite ville de province, François vit mal, il est n’est pas à l’aise dans sa famille et en conflit permanent avec son père, tueur dans un abattoir. Quant à sa mère, il la juge trop passive, soumise à cet homme brutal. A l’école, il est le souffre-douleur de ses camarades et, en définitive, n'est heureux que dans la nature, au contact des animaux qu’il aime et respecte. Introverti et hypersensible, il ne souhaite pas poursuivre ses études au-delà du bac et aspire à rester seul dans son coin de campagne. Mais comme il faut bien gagner sa vie, son père le fait embaucher à l’abattoir où il devient, comme lui, tueur.
Son premier contact avec l’abattoir est un choc terrible, les descriptions qu’il fait sont insupportables, on se croirait dans « La filière émeraude » de Michael Collins » (si je ne me trompe pas d’Irlandais). Par chance, la rencontre avec une femme provoquera le choc décisif qui va rompre la tradition familiale avec cette infernale machine à tuer.
Voilà un ouvrage qui est tout d'abord un terrible réquisitoire contre l’abattage des animaux en France mais, s’il n’avait été que cela, il ne m’aurait pas beaucoup passionné car ce sujet est désormais régulièrement traité dans les divers journaux télévisés. C’est devenu un marronnier médiatique. Ce qui m’a surtout interpellé est la fragilité de ce jeune homme devant cette situation sans issue, étant donné qu’il lui est impossible de trouver un autre emploi dans cette ville provinciale et impossible de dénoncer les pratiques sadiques de certains employés sans affronter la chaîne de la solidarité interne. Comment échapper alors à ce qui semble être une fatalité ?
Ce qui m’a le plus accroché dans ce récit, est l’excellence de l’écriture de son jeune auteur qui est en mesure de proposer des pages d’une grande poésie dans un contexte d’une brutalité inouïe. Le héros peut mettre ainsi un immense espace entre la forêt où il aime à se réfugier et l’abattoir tout proche. Il ne milite pas pour la reconsidération de la chaîne alimentaire, il voudrait seulement que les hommes ne considèrent plus les animaux comme des sujets de souffrance sur lesquels le premier venu peut exercer son sadisme incontrôlable. Aussi, j’attends avec impatience que Errol Henrot rédige un autre livre moins engagé qui mette davantage en valeur son écriture si fluide, si claire, si lumineuse.
Denis BILLAMBOZ
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