La publication de l'ensemble des lettres de François Mauriac, il y a de cela plusieurs années, dont une centaine inédites, révèle un pan méconnu de l'oeuvre du grand écrivain. | ||
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« Vos lettres, disait Chardonne à Mauriac, sont vous-même plus que tout ; et à votre oeuvre, il faut ajouter votre personne. » On y rencontre en effet le premier mouvement de la pensée aussi bien que la profondeur d'une lumineuse intelligence, les élans d'une âme sans cesse en éveil, les émotions du moment, la colère, la passion, l'ironie cinglante, la chaleur de l'amitié, l'ambiguïté des sentiments, les doutes, la foi, et tous les combats auxquels cet infatigable polémiste fut mêlé.
Il est vrai que Mauriac a toujours donné l'impression de causer la plume à la main, si bien qu'à travers ses lignes, il nous semble surprendre sa voix brisée par un cancer de la gorge. Caressant les uns, griffant les autres et convoquant à ses côtés toute la littérature française. Il arrive même que Mauriac se laisse intimider par le génie tempétueux de Claudel ou par l'intelligence retorse de Sartre mais jamais il ne s'abaissera, dans ses propos, à la moindre platitude.
Mauriac abritait deux hommes en lui, nous dit François-Laurent Balsa, un jésuite qui sentait le souffre et un janséniste qui vous aspergeait d'eau bénite. Le matin, il courait les offices religieux et le soir les salons mondains. C'était un homme du monde qui avait la tentation du désert et dont le drame fut de n'être que rarement d'accord avec son camp, mais sans parvenir à le quitter, si bien qu'il s'est trouvé souvent isolé, incompris, cruellement calomnié. C'est ce qui s'exprime dans cette correspondance, sorte de bloc-notes intime, où l'on suit l'évolution de sa pensée qui lui fait susurrer des choses graves et profondes de façon légère, parfois frivole, et toujours d'un style inimitable.
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