Semur, bâti sur un éperon de granit rose au-dessus de la rivière Armançon dans le département de la Côte d'Or, est une petite ville d'un charme fou, sise au coeur d'une campagne vallonnée. Elle mérite d'autant plus le détour qu'elle a toutes les chances d'être un coup de coeur pour le visiteur. Pour moi, il en fut ainsi, je l'ai aimée du premier coup d'oeil et je me plais à revenir y flâner lorsque mes pas me ramènent vers cette province magnifique : la Bourgogne. Semur surgit soudain devant vous dans l'enceinte de ses remparts ainsi qu'une enluminure médiévale et telle qu'elle était au XIV et XVe siècles, l'une des plus puissantes cités fortifiées du duché. Epousant la boucle de l'Armançon, elle se love dans son méandre avec ses rues étroites, ses places, ses remparts gardés par des tours impressionnantes : celles de l'Orle d'or, de la Gehenne, de la Prison et de Margot qui semblent tenir la ville enlacée entre leurs mains puissantes.
Une ancienne chronique assure que les Semurois sont des gens aimables qui " se plaisent fort en l'accointance des estrangers" et, il est vrai, que la ville se prête à l'affabilité avec ses maisons à pans de bois, ses vastes demeures classiques, ses anciens couvents - car la vie religieuse a profondément marqué la Bourgogne, terre d'églises et de monastères - ses hôtels de magistrats qui offrent au regard leurs porches ouvragés, leurs sculptures figuratives et leurs grilles altières. La marquise du Châtelet, tendre amie de Voltaire, épousa le gouverneur de Semur et habita l'une d'elles. Car Semur est le paradis de deux espèces singulières d'artistes - écrit Jean-Philippe Lecat - les connaisseurs de mobilier et de livres anciens et les cinéastes. Commissaire-priseur, galerie, antiquaire accueillent les premiers - poursuit-il - tandis que les artistes de l'image sont séduits en priorité par le décor. L'âme intacte d'une ville aussi étonnante ne peut manquer de fasciner. C'est ici qu'Yves Robert a tourné "Ni vu, ni connu". Le héros, campé par Louis de Funès, était un braconnier au grand coeur et les libations, auxquelles se livrait cette petite société, commençaient à perdre leur dignité à la cinquième prise. On le comprend quand on sait combien le vin bourguignon est gouleyant. Il faut s'attarder à Semur, la cité le mérite. Ainsi l'église Notre-Dame frappe par la pureté de ses lignes, son admirable mise au tombeau dans la tradition burgundo-flamande qui se trouve dans le bas-côté gauche et la suite des Vitraux de métiers qui rappelle que les professions du Moyen-Age s'organisaient en confréries religieuses sous la protection d'un saint patron. Progressivement ces confréries devinrent des "métiers", assurant la formation professionnelle et le respect des règles de qualité. Les vitraux de Semur datent du XVe siècle, une époque conquérante et joyeuse et leur intérêt documentaire est d'autant plus remarquable qu'il évoque opportunément la vigueur de l'industrie urbaine dans la Bourgogne médiévale.
L'Auxois était riche alors et, au cours des siècles, un équilibre intelligent fut maintenu qui s'appuyait essentiellement sur l'élevage, l'agriculture et un artisanat brillant et diversifié composé de forges et de tissages, tissage à partir de la laine des troupeaux de moutons des abbayes et des communautés rurales. Oui, Semur-en-Auxois continue de sourire, penché au-dessus du miroir formé par l'Armançon, dans son parfait décor de haies vives et de prairies closes.
Armelle BARGUILLET HAUTELOIRE
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