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13 août 2019 2 13 /08 /août /2019 06:59
Manoir des Frémonts.

Manoir des Frémonts.

Lorsque Proust séjourne plusieurs étés consécutifs à Trouville dans ses jeunes années, la station est considérée comme ” la reine des plages ” et est devenue en quelque sorte une annexe de la capitale, après qu’un peintre de 19 ans, arrivé de Honfleur à marée basse par le chemin de grève en une journée de l’été 1825, a posé son chevalet et son parasol sur les bords de la Touques et, à cette occasion, lancé sans le savoir Trouville, qui ne va pas tarder à supplanter les autres plages du littoral normand. Il a pour nom Charles Mozin et sera bientôt rejoint chez la mère Ozerais - qui tient l’auberge du « Bras d’or » par Eugène Isabey, Alexandre Decamps et Alexandre Dumas. Trouville s’apprête donc à détrôner Dieppe et Le Tréport où Marcel s’est rendu à plusieurs reprises quand il était enfant avec sa grand-mère maternelle et son frère Robert.

Dieppe avait été lancé par les Anglais, à la tête desquels le prince de Galles, Trouville le sera par des artistes et principalement des peintres. Et Dieu sait qu’ils seront nombreux à apprécier ce village de pêcheurs et sa longue plage de sable où le duo subtil de l’eau et du ciel ne cessera de les fasciner. Tous, les Mozin, Boudin, Courbet, Whistler, Monet, Corot, Bonnard, Degas, Helleu, Dufy, Marquet, Dubourg, plus proche de nous, essaieront de rendre sensible les vibrations de la lumière, les glacis fluides qui les accompagnent et cet aspect «porcelainé» dont parlait Boudin. Mais les peintres ne sont pas les seuls à être subjugués par la beauté des lieux : Flaubert l’avait été, Proust le sera à son tour, envoûté par les paysages mer/campagne, lorsque, séjournant à Trouville, il se promenait dans les sentiers qui longent la mer et y respirait le parfum mêlé de feuillées, de lait et de sel marin. C’est ainsi qu’il décrit l’une de ses promenades dans une lettre à Louisa de Mornand :

« Nous étions sortis d’un petit bois et avions suivi un lacis de chemins assez fréquentés dans la campagne qui domine Trouville et les chemins creux qui séparent les champs peuplés de pommiers, chargés de fruits, bordés de haies qui laissent parfois percevoir la mer.»

 

Nous sommes en octobre 1891, le jeune homme a 20 ans, il a passé son baccalauréat, accompli son service militaire, dont il a devancé l’appel pour en écourter le temps, et débuté des études de droit et de sciences politiques afin de se plier aux exigences de son père qui refuse à son aîné les disciplines littéraires et artistiques. Il a, dans la foulée, commencé à publier des nouvelles et articles dans une revue «Le Mensuel», revue où écrivent également plusieurs de ses condisciples de Sciences-Po sous la férule d’un certain Otto Bouwens, et dont le sommaire se partage entre des chroniques d’art, de mode et quelques textes de fiction. Marcel s’essaiera à tous les genres, y affirmera ses dons de critique et ses dispositions pour  les exercices de plume. Après un séjour à Cabourg en septembre, Proust est invité au manoir des Frémonts en octobre par son camarade de Condorcet Jacques Baignières, neveu d’Arthur Baignières et de son épouse Charlotte qui, par sa mère, appartenait au milieu social des notables normands. Ce manoir a été construit en 1869 par l’architecte Jacques-Claude Baumier pour Arthur Baignières sur un terrain acheté en 1861 par son beau-père Paul Borel, collaborateur de Ferdinand de Lesseps, qui eut le malheur de mourir quelques semaines avant l’inauguration du canal. L’architecte Jacques Baumier a construit également le Grand Hôtel d’Houlgate et établi le premier plan d’urbanisme de cette station balnéaire. Il est, d’après Claude Mignot, le créateur du type de la villa néo-normande et le rénovateur des constructions en bois inspirées par les manoirs normands. Cette demeure admirablement située sur la colline inspirera à Marcel la propriété de La Raspelière où se passent de nombreuses scènes de La Recherche et qu’il décrit ainsi dans « Sodome et Gomorrhe » :

«De la hauteur où nous étions déjà, la mer n’apparaissait plus, ainsi que de Balbec, pareille aux ondulations de montagnes soulevées, mais, au contraire, comme apparaît d’un pic, ou d’une route qui contourne la montagne, un glacier bleuâtre, ou une plaine éblouissante, situés à une moindre altitude. Le déchiquetage des remous y semblait immobilisé et avoir dessiné pour toujours leurs cercles concentriques ; l’émail même de la mer, qui changeait insensiblement de couleur, prenait vers le fond de la baie, où se creusait un estuaire, la blancheur bleue d’un lait, où de petits bacs noirs qui n’avançaient pas semblaient empêtrés comme des mouches. Il ne me semblait pas qu’on pût découvrir de nulle part un tableau plus vaste. L’air à ce point si élevé devenait d’une vivacité et d’une pureté qui m’enivraient. J’aimais les Verdurin ; qu’ils nous eussent envoyé une voiture me semblait d’une bonté attendrissante. Je leur dis que je n’avais jamais rien vu d’aussi beau

Non seulement le jeune Marcel est séduit par l’ampleur des paysages et l’élégance du manoir, mais c’est à l’occasion de ce séjour que le peintre Jacques-Emile Blanche, ami d’Arthur Baignières et de la famille Proust, réalisera de lui un dessin au crayon qui sera suivi, quatre ans plus tard, d’un  portrait à l’huile, le fameux portrait à l’orchidée à la boutonnière qui se trouve au musée d’Orsay, portrait dont Proust était fier car il y apparaît dans la fraîcheur de ses 20 ans, lumineux de jeunesse, le regard caressant, ayant acquis une conscience plus aiguë de sa personne qui dément l’image d’un adolescent gauche, mal ficelé tel qu’en lui-même on le surprend sur nombre de clichés de collège. Il écrira dans « Essais et Articles » :

« Une esquisse au crayon, qui a précédé mon portrait à l’huile, a été faite avant le dîner à Trouville dans les admirables Frémonts qui étaient alors la résidence de M. Arthur Baignières et où montaient du manoir des Roches ou de la Villa persane, la marquise de Galliffet, cousine germaine de la maîtresse de maison, avec la princesse de Sagan, toutes deux dans leur élégance aujourd’hui à peu près indescriptible d’anciennes  belles de l’Empire. »

Dès le premier regard, Marcel Proust tombe sous le charme de cette demeure qui lui ouvre des paysages sublimes, multipliant les points de vue sur la mer et la campagne avec ces horizons lointains, qui se modifient selon les heures du jour et les variations constantes de la lumière, parfois mouillés de pluie, parfois évanescents. Dans « La Recherche », il évoquera cette route de la Corniche dans « Du côté de Guermantes » :

 « Il me semblait qu’on pût découvrir de nulle part un tableau plus vaste. Mais à chaque tournant, une partie nouvelle s’y ajoutait, et quand nous arrivâmes à l’octroi de Douville, l’éperon de falaise qui nous avait caché jusque-là une moitié de la baie rentra, et je vis tout à coup à ma gauche un golfe aussi profond que celui que j’avais eu jusque-là devant moi, mais dont il changeait les proportions et doublait la beauté. »

Ou encore, à propos de la demeure elle-même : «  J’avais toujours entendu célébrer le coup d’œil unique de la Raspelière, située au faîte de la colline et où, dans un grand salon à deux cheminées, tout une rangée de fenêtres regarde au bout des jardins, entre les feuillages, la mer jusqu’au-delà de Balbec et l’autre rangée, la vallée. »

Caillebotte : vue de la colline de Trouville.

Caillebotte : vue de la colline de Trouville.

 

Elève de Gervex et Humbert, Jacques-Emile Blanche, qui participe de l’univers proustien par son amour de la Normandie et celui de l’art, raison pour laquelle je l’évoque ici, avait hésité un moment entre la musique et la peinture. Il est vrai que son père (médecin aliéniste renommé) recevait de nombreux musiciens comme Gounod, Berlioz, Bizet et que le jeune homme fut très tôt un excellent pianiste. Mais le goût de la peinture sera le plus fort et son admiration pour Manet et Whistler une probable incitation à opter pour le pinceau plutôt que pour le clavier. Blanche va très vite se spécialiser dans le portrait : «  Je ne suis qu’un portraitiste qui raconte ce qu’il voit » - dira-t-il. Blanche fixera sur la toile les visages des personnalités les plus emblématiques de son temps : non seulement Proust, mais Montesquiou, Henri de Régnier, Anna de Noailles, André Gide, Jean Cocteau, Maurice Barrès, Henri de Montherlant, Mauriac, Stravinski, Bergson et quelques autres. Sa sensibilité s’exprimera également dans le pastel qu’il utilise avec virtuosité, notamment dans ses portraits de femmes. De même qu’il fera un délicieux portrait du fils de Paul-César Helleu, Jean Helleu enfant, en habit de pierrot, d’une facture particulièrement délicate. Jacques-Emile Blanche sera également un écrivain et un critique d’art avisé. Dans son ouvrage « Propos de peintre – de David à Degas », il rend compte et exalte les œuvres de ses contemporains et prédécesseurs d’une plume alerte et éprouvée. Marcel Proust, qui rédigea la préface, ne partageait pas son point de vue, considérant que l’œuvre est toujours supérieure à son auteur et ne l’explique nullement, si bien qu’il ne craindra pas de le contredire sur ce point précis  :

 

 «  Le défaut de Jacques Blanche critique, comme Sainte-Beuve, c’est de refaire l’inverse du trajet qu’accomplit l’artiste pour se réaliser, c’est d’expliquer le Fantin ou le Manet véritable, celui que l’on ne trouve que dans leur œuvre, à l’aide de l’homme périssable, pareil à ses contemporains, pétri de défauts, auquel une âme originale était enchaînée, et contre lequel elle protestait, dont elle essayait de se séparer, de se délivrer par le travail. »

 

 

Jean Helleu enfant, par Jacques-Emile Blanche

Jean Helleu enfant, par Jacques-Emile Blanche

Tous deux fréquentaient les mêmes salons dont celui de Madame Straus à Paris comme à Trouville. De même que Marcel, le peintre aimait la Normandie, ses jardins, ses chemins creux, ses clochers qui pointent à l’horizon et la gravité lumineuse des paysages. Comme lui aussi, il appréciait cette communion harmonieuse et vivifiante avec la nature. Après avoir séjourné de 1896 à 1901 au château de Tout-la-Ville entre Deauville et Pont-L’Evêque, lui et sa femme Rose louèrent le manoir de Tôt à Offranville, en Seine-Maritime, où ils aimaient à poursuivre à la campagne leurs relations urbaines avec les personnalités les plus en vue du monde littéraire, artistique et politique d’alors. Les frères Goncourt, qui n’avaient pas la plume tendre, s’amusaient à dire que Jacques Emile-Blanche était susceptible et cancanier. Il n’y a qu’à lire « La Recherche du Temps Perdu » pour savoir que les propos aigres-doux étaient en vogue et animaient bien des conversations. Ainsi la Normandie sera-t-elle pour ce peintre mondain un lieu d’ancrage privilégié.

 

Ce le fut également pour la comtesse de Boigne, fille aînée du marquis d’Osmond, née en 1781, élevée à la cour du roi Louis XVI qui l’avait  tenue petite fille sur ses genoux car il aimait cette enfant ravissante devenue l’amie intime de ses propres enfants. La comtesse de Boigne et son compagnon le chancelier Pasquier, élevé à cette dignité par Louis-Philippe en 1837, ont résidé une partie de leur vie à Trouville où leur plaisait l’alliance de la campagne et de la mer et qu’ils ont contribué à lancer. On sait que Proust admirait les mémorialistes, Saint-Simon plus que tout autre, et, sans avoir peut-être lu l’intégralité des Mémoires de la Comtesse, il rédigea un article dans le Figaro où, selon la biographe de Mme de Boigne, Françoise Wagener, il se révèle un piètre historien. Il est certain que Proust a vu en la Marquise de Villeparisis, le personnage de La Recherche inspiré par la comtesse, quelqu’un de beaucoup plus frivole, une sorte de douairière surannée, davantage Belle Epoque qu’Ancien Régime, ce qui ne concorde pas avec le caractère de Madame de Boigne qui était tout sauf frivole. Elle mourut en 1866, cinq ans avant la naissance de Proust.

Adélaïde d'Osmond, comtesse de Boigne.

Adélaïde d'Osmond, comtesse de Boigne.

 

D’ailleurs la famille de Proust avait, elle-aussi, fréquenté la station bien avant 1871. En effet, Adolphe Crémieux, auteur du décret d’octobre 1870 attribuant la citoyenneté française aux indigènes israélites d’Algérie, grand-oncle de Marcel par sa mère, qui fut tour à tour sénateur, député, garde des sceaux et ministre de la justice, avait acquis, en 1863, pour la somme de 106.ooo frs, deux chalets construits par Adolphe Cordier, le promoteur de Trouville, situés en face de l’hôtel des Roches Noires dont l’un des deux existe toujours. Adolphe Crémieux avait  été en 1870 le témoin de mariage du professeur Adrien Proust et de sa nièce  Jeanne Weil. A sa mort, sa fille Mathilde en prit possession et Proust lui rendit visite lors d’un de ses séjours trouvillais, sans doute celui de 1884, mais le souvenir, qu’il en gardait, était peu enthousiaste. Dans une lettre à Geneviève Straus, il écrit ceci : «  Il semble que je respirais très mal dans une ligne de maisons en second plan qui se trouvaient en retrait derrière l’hôtel des Roches Noires, mais tout cela est un peu vague. » 

 

En août 1892, celui-ci était à nouveau aux Frémonts que les Finaly, autres amis de Marcel, avaient loués aux Baignières par son entremise. Si bien que Marcel n’est pas seulement un incomparable guide touristique mais il peut être ainsi, à l’occasion, un agent immobilier puisqu’il sut mettre en relation Arthur Baignières, qui souhaitait vendre les Frémonts, avec Horace de Landau qui l’acheta 152.000 francs pour l’offrir à sa nièce Jenny, la jolie Madame Finaly. Marcel avait connu les Finaly grâce à Horace Finaly qui se trouvait dans la même classe que lui au lycée Cordorcet. Fernand Gregh a évoqué plaisamment cette famille qu’il trouvait shakespearienne. L’ancêtre prestigieux était Horace de Landau qui vivait à Florence et que l’on appelait le Roi LIRE, en raison de sa fabuleuse bibliothèque. Hugo Finaly, le père d’Horace, incarnait lui aussi cette haute finance que Marcel a beaucoup fréquentée à travers d’autres relations comme les Fould ou les Rothschild, et dont il s’est servi pour camper ses personnages, Rufus Israël ou Nissim Bernard. Horace, l’ami de collège de Marcel, régnera à son tour sur les finances françaises en étant le directeur de la banque de Paris et des Pays-Bas de 1919 à 1937 et quittera notre pays pour les Etats-Unis en 1940 afin d’échapper aux mesures raciales. Il mourra à New-York en 1945. Ses héritiers légueront la villa de Florence à la chancellerie de l’Université de Paris à laquelle elle appartient toujours. Le propriétaire actuel des Frémonts, Monsieur Lebas, est le descendant de l’une des quatre filles d’Hugo Finaly, Edith Hélène née en 1888. Quant à la délicieuse Mary Finaly, dont on pense qu’elle a un peu inspiré le personnage de Gilberte, soeur d'Edith, elle est l’arrière grand-tante de notre hôte.

Les chalets Crémieux à l'époque.

Les chalets Crémieux à l'époque.

Jenny Finaly vers 1880, femme de Hugo Finaly, née Eugenia  Ellenberger, nièce d'Horace de Landau. (collection privée)

Jenny Finaly vers 1880, femme de Hugo Finaly, née Eugenia Ellenberger, nièce d'Horace de Landau. (collection privée)

Marie-Irène Finaly aux Frémonts en 1898  (collection privée). Décédée en 1918 à l'âge de 45 ans de la grippe espagnole.

Marie-Irène Finaly aux Frémonts en 1898 (collection privée). Décédée en 1918 à l'âge de 45 ans de la grippe espagnole.

A son retour de Trouville, en 1892, Marcel rédigera un texte tout empli de ces visions successives qu’il fera paraître dans « Les plaisirs et les jours »  quatre ans plus tard :

 

« La mer fascinera toujours ceux chez qui le dégoût de la vie et l'attrait du mystère ont devancé les premiers chagrins, comme un pressentiment de l'insuffisance de la réalité à les satisfaire. Ceux-là qui ont besoin de repos, avant d'avoir éprouvé encore aucune fatigue, la mer les consolera, les exaltera vaguement. Elle ne porte pas comme la terre les traces des travaux des hommes et de la vie humaine. Rien n'y demeure, rien n'y passe qu'en fuyant, et des barques qui la traversent, combien le sillage est vite évanoui ! De là cette grande pureté de la mer que n'ont pas les choses terrestres. Et cette eau vierge est bien plus délicate que la terre endurcie qu'il faut une pioche pour entamer. Le pas d'un enfant sur l'eau y creuse un sillon profond avec un bruit clair, et les nuances unies de l'eau en sont un moment brisées; puis tout vestige s'efface, et la mer est redevenue calme comme aux premiers jours du monde. Celui qui est las des chemins de la terre ou qui devine, avant de les avoir tentés, combien ils sont âpres et vulgaires, sera séduit par les pâles routes de la mer, plus dangereuses et plus douces, incertaines et désertes. Tout y est plus mystérieux, jusqu'à ces grandes ombres qui flottent parfois paisiblement sur les champs nus de la mer, sans maisons et sans ombrages, et qu'y étendent les nuages, ces hameaux célestes, ces vagues ramures.

 

La mer a le charme des choses qui ne se taisent pas la nuit, qui sont pour notre vie inquiète une permission de dormir, une promesse que tout ne va pas s'anéantir, comme la veilleuse des petits enfants qui se sentent moins seuls quand elle brille. Elle n'est pas séparée du ciel comme la terre, est toujours en harmonie avec ses couleurs, s'émeut de ses nuances les plus délicates. Elle rayonne sous le soleil et chaque soir semble mourir avec lui. Et quand il a disparu, elle continue à le regretter, à conserver un peu de son lumineux souvenir, en face de la terre uniformément sombre. C'est le moment de ses reflets mélancoliques et si doux qu'on sent son coeur se fondre en les regardant. Quand la nuit est presque venue et que le ciel est sombre sur la terre noircie, elle luit encore faiblement, on ne sait par quel mystère, par quelle brillante relique du jour enfouie sous les flots. Elle rafraîchit notre imagination parce qu'elle ne fait pas penser à la vie des hommes, mais elle réjouit notre âme, parce qu'elle est, comme elle, aspiration infinie et impuissante, élan sans cesse brisé de chutes, plainte éternelle et douce. Elle nous enchante ainsi comme la musique, qui ne porte pas comme le langage la trace des choses, qui ne nous dit rien des hommes, mais qui imite les mouvements de notre âme. Notre coeur en s'élançant avec leurs vagues, en retombant avec elles, oublie ainsi ses propres défaillances, et se console dans une harmonie intime entre sa tristesse et celle de la mer, qui confond sa destinée et celle des choses. »

 

A lire ces lignes, on comprend pourquoi les peintres ont été nombreux à s’inspirer de la beauté de ces paysages et des lumières si changeantes sur la mer depuis que Charles Mozin et Eugène Boudin y avaient posé leur chevalet. Entre Trouville et Charles-Louis Mozin, ce fut même une véritable histoire d’amour, un coup de cœur qui a su se prolonger. Bien que né à Paris dans une famille de musiciens comme Blanche, le jeune homme découvrira très tôt sa vocation de peintre au contact de la Normandie. Sa première cliente n’est pas une inconnue puisqu’il s’agit de la duchesse de Berry, la mère du comte de Chambord. Elle assure à Mozin la célébrité dans la capitale française. Louis-Philippe reconnaît également ses talents de peintre de marines en lui commandant une série de batailles navales destinées au château de Versailles. Mozin participera donc activement au développement de Trouville grâce à ses œuvres exposées dans les Salons parisiens, puis en entrant au conseil municipal en 1843. Ses toiles se plairont d’ailleurs à évoquer, en un émouvant réalisme, la beauté sauvage de la côte normande et sa campagne. Les falaises des Roches noires sont l’un des endroits emblématiques de la région entre Trouville et Villerville où Mozin attardait volontiers ses pinceaux et qui étaient prisées des notables. Ils édifièrent, le long de cette plage, d'élégantes demeures et Mozin, lui-même, fera bâtir la tour Malakoff, toujours présente à Trouville de nos jours et dont l’une des dernières propriétaires fut la comédienne Elina Labourdette, épouse de Louis Pauwels, celui qui a créé dans les années 1960 le Figaro-Magazine. Mozin mourra à Trouville en 1862 mais sera enterré à Paris au cimetière Montmartre.
 

La tour Malakoff peinte par Boudin

La tour Malakoff peinte par Boudin

Au manoir de la Cour-Brûlée d’abord, ensuite dans celui des Mûriers, qu’elle fera construire, Madame Straus, veuve du compositeur Bizet, apprécie elle aussi la beauté des lieux où elle se transporte et prolonge, à la saison estivale, son salon parisien. Après Flaubert, qui était tombé amoureux à Trouville de la belle Madame Schlésinger qui lui inspirera le personnage central de « L’éducation sentimentale », après Alexandre Dumas qui appréciait à Trouville sa belle chambre à l’hôtel du Bras d’or et les repas copieux qu’on lui servait pour un prix dérisoire, apparaît, comme le familier du salon de Geneviève Straus, Marcel Proust. En 1883 et 1884, il revient à Trouville mais avec sa mère et tous deux s’installent à l’hôtel des Roches-Noires  qui offre le luxe et le confort le plus récent : 300 chambre dont la plupart avec salles de bains, service de transport depuis la gare et cabines sur la plage à traction animale pour prendre des bains, même à marée basse. Le train à voie étroite ramenait chaque été son lot de villégiaturistes. Les passagers descendaient enveloppés dans des pelisses, les femmes dissimulées sous des voilettes qui les protégeaient des escarbilles. Les calèches attendaient devant la gare, inaugurée en 1863, trois ans après le pont de la Touques qui, dorénavant, relie Trouville à Deauville sa cadette. La vie était agréable, les siestes rêveuses derrière les jalousies, les  promenades bucoliques dans les sentes qui longent la mer, paysages que Marcel ne se lassera pas de décrire sous les lumières qui varient à chaque heure ou s’immobilisent la nuit sous les découpes ajourées de la lune. On peut associer Proust aux peintres à qui il emprunte les couleurs qui rendent grâce des paysages et colorent ses propres mots, fardent les couchers de soleil sur le large et les maisons moitié normandes, moitié anglaises où «l’abondance des épis de faîtage multiplie les points de vue et  en complique la silhouette.» - précisait-il.

 

Tout concoure à faire de ces étés successifs des moments rares dont l’écrivain se souviendra avec émotion et qui lui inspireront quelques-unes de ses plus belles descriptions de la nature : les fleurs en quantité, les points de vue qui foisonnaient autour de «Douville», l’église toute en clochetons, épineuse et rouge, fleurissante comme un rosier, enfin ces veillées où apparaissaient dans le ciel ombré, pareille à une légère et mince pelure, une lune étroite «qu’un invisible couteau avait taillé comme le frais quartier d’un fruit ». Pour nous en persuader, relisons ce qu’il écrira, des années plus tard à son amie Louisa de Mornand, lorsqu’il apprendra qu’elle se rend à Trouville :

 

« Ma petite Louisa,

J’apprends que vous avez l’intention de passer l’été près de Trouville. Comme je suis fou de ce pays, le plus beau que je connaisse, je me permets de vous donner quelques indications. Trouville est fort laid, Deauville affreux, le pays entre Trouville et Villers médiocre. Mais entre Trouville et Honfleur, sur la hauteur est le plus admirable pays qu’on puisse voir dans la campagne la plus belle, avec des vues de mer idéales. Et là il y a des habitations connues seulement des artistes et devant qui j’ai entendu des millionnaires s’écrier : «Quel malheur que j’aie un château au lieu d’habiter ici !» Et des chemins perdus admirables pour le cheval, de vrais nids de poésie et bonheur. Ce qu’il y a de plus beau, mais est-ce à louer ? - est « les Allées Marguerite », propriété affolante avec des kilomètres de rhododendrons sur la mer. Elle appartenait à un Monsieur d’Andigné et Guitry qui en était fou (pas de Monsieur d’Andigné, de la propriété) l’a louée plusieurs années. La loue-t-il encore ? Est-elle encore à louer ? Je ne puis vous le dire mais je pourrais vous le savoir et vous-même, si vous connaissiez Sacha Guitry, le pourriez. Peut-être serait-ce trop immense pour vous. Mais je crois qu’on a cela pour un morceau de pain. Près d’Honfleur, il y a aussi d’idéales maisons. Voulez-vous que je m’informe ? ”

 

Et quelques mois plus tard :
 

« Je suis content de vous savoir à Trouville puisque cela me donne la joie d’imaginer une des personnes qui me plaisent le plus dans un des pays que j’aime le mieux. Cela concentre en une seule deux belles images. Je ne sais pas au juste où est votre villa Saint-Jean. Je suppose qu’elle est sur la hauteur entre Trouville et Hennequeville, mais je ne sais si elle regarde la mer ou la vallée. Si elle regarde la mer, elle doit l’apercevoir entre les feuillages, ce qui est si doux et le soir vous devez avoir des vues du Havre admirables. On a dans ces chemins un parfum mêlé de feuillées, de lait et de sel marin qui me parait plus délicieux que les mélanges les plus raffinés..

Si vous donnez sur la vallée, je vous envie des clairs de lune qui opalisent le fond de la vallée à faire croire que c’est un lac. Je me souviens d’une nuit où je suis revenu d’Honfleur par ces chemins d’en haut. A chaque pas nous butions dans des flaques de lune et l’humidité de la vallée semblait un immense étang. Je vous conseille une promenade à pied très jolie qui s’appelle « les Creuniers». De là vous aurez une vue admirable, et une paix, un infini dans lequel on a la sensation de se dissoudre entièrement. De là tous vos soucis, tous vos chagrins vous apparaissent aussi petits que les petits bonshommes ridicules qu’on aperçoit sur le sable. On est vraiment en plein ciel. En voiture, je vous conseille une promenade plus belle : les allées Marguerite. Mais une fois arrivé il faut ouvrir la petite barrière de bois, faire entrer la voiture ( si le propriétaire actuel n’habite pas ) et vous promener pendant des heures dans cette forêt enchantée avec les rhododendrons devant vous et la mer à vos pieds ».
 

Le manoir de la Cour-Brûlée construit en 1864, appartenant à Madame Lydie Aubernon de Neville et loué plusieurs années à Madame  Straus.

Le manoir de la Cour-Brûlée construit en 1864, appartenant à Madame Lydie Aubernon de Neville et loué plusieurs années à Madame Straus.

Marcel Proust au manoir de la Cour-Brûlée en compagnie de Madame Straus.

Marcel Proust au manoir de la Cour-Brûlée en compagnie de Madame Straus.

Le manoir des Mûriers, propriété des Straus où ils s'installent en 1893.

Le manoir des Mûriers, propriété des Straus où ils s'installent en 1893.

Et au sujet de la jolie église de Criquebœuf, s’adressant toujours à Louisia de Mornand, il poursuit :

« Dites-lui de tendres choses de ma part, et aussi à un vieux poirier, cassé mais infatigable comme une vieille servante, qui maintient de toute la force de ses bras tordus par l’âge mais encore verts, une petite maison du village avoisinant, à l’unique fenêtre de laquelle sourient souvent de jolies figures de petites filles, qui ne sont peut-être plus ni petites, ni jolies, ni même filles, car il y a longtemps de cela ».

Eglise de Criqueboeuf.

Eglise de Criqueboeuf.

C’est ainsi qu’habité par ses souvenirs, il a transposé dans son œuvre, les images emmagasinées lors de ces séjours trouvillais au point que dans  « Sodome et Gomorrhe » les trois points de vue dont il parle à propos de La Raspelière – propriété que les Verdurin louent à Madame de Cambremer dans son ouvrage – ressemblent à s’y méprendre à ceux des Frémonts :

«Disons du reste, que le jardin de la Raspelière était en quelque sorte un abrégé de toutes les promenades qu’on pouvait faire à bien des kilomètres alentour. D’abord à cause de sa position dominante, regardant d’un côté la vallée, de l’autre la mer, et puis parce que, de même d’un seul côté, celui de la mer par exemple, des percées avaient été faites au milieu des arbres de telle façon que d’ici on embrassait tel horizon, de là tel autre. Il y avait à chacun de ces points de vue un banc ; on venait s’asseoir tour à tour sur celui d’où on découvrait Balbec, ou Parville, ou Douville. Même dans une seule direction, on avait placé un banc plus ou moins à pic sur la falaise, plus ou moins en retrait. De ces derniers, on avait un premier plan de verdure et un horizon qui semblait déjà le plus vaste possible, mais qui s’agrandissait infiniment si, continuant par un petit sentier, on allait jusqu’à un banc suivant d’où l’on embrassait tout le cirque de la mer. Là on percevait exactement le bruit des vagues, qui ne parvenait pas au contraire dans les parties les plus enfoncées du jardin, là où le flot se laissait voir encore, mais non plus entendre.”  (Sodome et Gomorrhe)

 

Tandis que les jeunes gens refont le monde, que les femmes se promènent sur les planches, la princesse de Sagan – toujours escortée d’un petit page noir comme l’ébène, vêtu de rouge, qui tient son réticule et son ombrelle – en compagnie des marquises de Montebello et de Gallifet, que les hommes sont allés jouer et fumer au Casino auquel vient d’être ajouté une salle de spectacle, la sœur d’Horace, la jeune Mary Finaly, aux beaux yeux verts, joue les coquettes et les mystérieuses auprès de ses soupirants qui se disputent l’honneur de l’emmener se promener dans le parc au clair de lune ou d’aller goûter, avec le reste de la bande, dans une ferme-restaurant des environs. Ce sont les fermes dites des Ecorres, de la Croix d’Heuland, de Marie-Antoinette ou « Les Aulnettes » au-dessus d’Houlgate. On y boit du cidre en mangeant du pain brié, ce pain qu’introduisirent au XIVe siècle des moines espagnols échoués sur la côte du Calvados.

« Mais quelquefois au lieu d’aller dans une ferme, nous montions jusqu’au haut de la falaise, et une fois arrivés et assis sur l’herbe, nous défaisions notre paquet de sandwichs et de gâteaux. Etendu sur la falaise, je ne voyais devant moi que des prés et, au-dessus d’eux, non pas les sept ciels de la physique chrétienne, mais la superposition de deux seulement, un plus foncé – la mer – et en haut un plus pâle».

 

Et il ajoute :
 

« Nous partions ; quelque temps après avoir contourné la station de chemin de fer, nous entrions dans une route campagnarde qui me devint bientôt aussi familière que celles de Combray, depuis le coude où elle s’amorçait entre des clos charmants jusqu’au tournant où nous la quittions et qui avait de chaque côté des terres labourées. Au milieu d’elles, on voyait çà et là un pommier, privé il est vrai de ses fleurs et ne portant plus qu’un bouquet de pistils, mais qui suffisait à m’enchanter parce que je reconnaissais ces feuilles inimitables dont la large étendue, comme le tapis d’estrade d’une fête nuptiale maintenant terminée, avait été récemment foulée par la traîne de satin blanc de fleurs rougissantes».

 

Ce qui ne l’empêche nullement de décrire dans «Sodome et Gomorrhe» les pommiers en fleurs, qu’il n’a probablement jamais vus, ne résidant pas en Normandie ou dans une autre campagne au mois de mai et cela, d’autant plus, qu’il souffrait cruellement de l’asthme des foins et restait plus volontiers chez lui à cette époque de l’année :
 

« Mais, dès que je fus arrivé à la route, ce fut un éblouissement. Là où je n’avais vu, avec ma grand-mère, au mois d’août, que les feuilles et comme l’emplacement des pommiers, à perte de vue ils étaient en pleine floraison, d’un luxe inouï, les pieds dans la boue et en toilette de bal, ne prenant pas de précautions pour ne pas gâter le plus merveilleux satin rose qu’on eût jamais vu et que faisait briller le soleil ; l’horizon lointain de la mer fournissait aux pommiers comme un arrière-plan d’estampe japonaise ; si je levais la tête pour regarder le ciel entre les fleurs, qui faisaient paraître son bleu rasséréné, presque violent, elles semblaient s’écarter pour montrer la profondeur de ce paradis. Sous cet azur, une brise légère mais froide qui faisait trembler légèrement les bouquets rougissants. Des mésanges bleues venaient se poser sur les branches et sautaient entre les fleurs, indulgentes, comme si c’eût été un amateur d’exotisme et de couleurs qui avait artificiellement créé cette beauté vivante. Mais elle touchait jusqu’aux larmes parce que, si loin qu’elle allait dans ses effets d’art raffiné, on sentait qu’elle était naturelle, que ces pommiers étaient là en pleine campagne, comme des paysans sur une grande route de France».

 

Pour les vertus thérapeutiques que l’on reconnaissait désormais aux bains de mer, pour son casino et son champ de courses, une autre relation de Marcel se plaisait à Deauville et prenait le temps d’installer son chevalet à bord de l’un de ses yachts, afin de saisir sur le vif  l’atmosphère pétillante et légère de la vie estivale qui faisait de chacune de ces fêtes des moments enchanteurs. C’était le peintre Paul Helleu, amoureux de la mer et des femmes. Et l’hippodrome en question n’était autre que celui de Deauville inauguré le 14 août 1864, dont le duc de Morny, frère adultérin de Napoléon III, avait souhaité parer la station balnéaire de Deauville, sœur siamoise de Trouville, qu’il avait fait naître en 1860 des sables et de l’eau et que seul un pont sépare toujours de son aînée. Le duc, propriétaire d’une écurie à Viroflay, membre du Jockey-club, initiateur du champ de courses de Longchamp, y voyait le moyen d’attirer les amateurs vers la cité normande en prolongeant la saison des courses dans un lieu qui offrait, par ailleurs, tant d’autres divertissements.

Vue prise du manoir des Frémonts vers  les années 1920.

Vue prise du manoir des Frémonts vers les années 1920.

Dès la première édition, les courses de plat de Deauville s’affirmaient comme un événement mondain qu’il ne fallait manquer sous aucun prétexte et si Helleu avait choisi d’amarrer ses voiliers successifs dans le port de plaisance  de Deauville – celui de Trouville étant consacré à la pêche et au commerce – c’est parce que la région était en passe de devenir le XXIe arrondissement de Paris et que le peintre retrouvait là, chaque été, non seulement le yachting et les courses, mais les femmes de cette élégante société aristocratique qui composaient l’essentiel de sa clientèle. Les bateaux servaient alors de résidences secondaires avec parfois vingt-cinq à trente hommes d’équipage à leur bord et permettaient à leurs propriétaires de recevoir de façon plus conviviale et moins protocolaire mais avec tout autant de magnificence.

En 1880, Henri Greffulhe, marié à la belle Elisabeth de Caraman-Chimay – dont Proust admirait tant la beauté et l’élégance qu’elle lui inspirera un peu de sa princesse de Guermantes – avait fait bâtir sur le front de mer de Deauville la villa «La Garenne» aujourd’hui disparue, où son épouse poursuivait, à la saison estivale, les activités de son salon parisien, tandis que Mme Aubernon de Nerville, puis Mme Straus, qui avaient préféré le cadre mer/campagne des hauteurs de Trouville, régnaient sur l’autre rive de la Touques. On sait que, pour sa part, Paul Helleu a participé à créer le personnage du peintre Elstir qui compose, avec le musicien Vinteuil et l’écrivain Bergotte, le trio artistique de La Recherche. Il semble donc, que durant ces étés trouvillais, se soient mis en place, dans l’inconscient de leur auteur, quelques-uns des personnages qui animeront, bien des années plus tard, son roman :

« De sorte que si, avant ces visites chez Elstir, avant d’avoir vu une marine de lui où une jeune femme, en robe de barège ou de linon, dans un yacht arborant le drapeau américain, mit le double spirituel d’une robe de linon blanc et d’un drapeau dans mon imagination qui aussitôt couva un désir insatiable de voir sur-le-champ des robes de linon blanc et des drapeaux près de la mer, comme si cela n’était jamais arrivé jusque-là, je m’étais toujours efforcé, devant la mer, d’expulser du champ de ma vision, aussi bien que les baigneurs du premier plan, les yachts aux voiles trop blanches comme un costume de plage, tout ce qui m’empêchait de me persuader que je contemplais le flot immémorial qui déroulait déjà sa même vie mystérieuse avant l’apparition de l’espèce humaine, et jusqu’aux jours radieux qui me semblaient revêtir de l’aspect banal de l’universel été cette côte de brume et de tempêtes, y marquer un simple temps d’arrêt, l’équivalence de ce qu’on appelle en musique une mesure pour rien» – lit-on dans «A l’ombre des jeunes filles en fleurs».
 

Ce que lui apprend le peintre où, plutôt, ce que nous apprend Proust par la voix d’Elstir, est que l’art met en lumière certaines lois et que chaque artiste est tenu de recommencer sans fin, et pour son compte, un effort individuel, afin de séparer le vrai réel du faux vrai. Et à Trouville, durant ces étés apparemment insouciants, il a pris la mesure des choses, voyant surgir, comme une flottille, les églises de Criqueboeuf ou de Hennequeville. C’est très probablement là que s’est révélé à lui l’idée que la tâche d’un écrivain est de redire – comme l’avait fait Homère – ce qu’il a vu et ce qu’il a senti, car ces choses contemplées, et fatalement quittées, prennent ensuite, dans notre mémoire, une importance extraordinaire puisqu’elles nous apprennent que le temps peut renaître à tout moment, mais hors du temps. Ainsi le jeune homme imprime-t-il en lui des paysages qui fixent à jamais son goût et vers lesquels il reviendra comme cela se fait pour une œuvre picturale ou musicale. Ces paysages élus sont en quelque sorte des références sensibles et, grâce à eux et à l’évocation que l’on souhaite en faire, le goût et le style se façonnent et s’affinent. Ainsi les images recueillies en Normandie sont-elles, comme dans les toiles d’Elstir, celles de la campagne au-dessus de la mer et, plus précisément, au-dessus de Trouville. C’est du moins ce qu’il résume en quelques lignes dans un article intitulé «Les choses normandes» publié dans le N° 12 de la revue «Le Mensuel» :
 

«  Ainsi cette campagne, la plus riche de France qui, avec son abondance intarissable de fermes, de vaches, de crème, de pommiers à cidre, de gazon épais, n’invite qu’à manger et à dormir, se pare, la nuit venue, de quelque mystère et rivalise de mélancolie avec la grande plaine de la mer».

 

Paul Helleu, dont Elstir est en partie la réincarnation littéraire, disait aimer peindre les femmes sur leur yacht et, également, les marines.

«  Je compris que des régates, que des meetings sportifs où les femmes bien habillées baignent dans la glauque lumière d’un hippodrome marin, pouvaient être pour un artiste moderne, un motif aussi intéressant que les fêtes qu’ils aimaient tant à décrire pour un Véronèse ou un Carpaccio . » - écrit-il dans « Sodome et Gomorrhe ».

 

Mais d’autres peintres ont contribué à inspirer le personnage d’Elstir, sans doute Degas que Proust rencontrera chez Mme Straus à Trouville, Vuillard qu’il croisa sur la côte entre Deauville et Cabourg et dont il emprunte certains traits de langage, enfin Monet qui a peint une célèbre toile de l’hôtel des Roches Noires et qui lui avait été présenté par Madeleine Lemaire lors d’un séjour qu’il fît chez elle à Dieppe avec Reynaldo Hahn.  Quant à Paul Helleu, il avait avec Adrien Proust, le père de Marcel, un point commun : celui d’avoir quitté sa province  natale– la Bretagne – pour monter à Paris et réussir à s’y imposer par son seul talent, tandis qu’il partageait avec Marcel deux qualités appréciables : la générosité et la modestie. Il offrira l’une de ses toiles à Marcel et fera une pointe sèche très émouvante de l’écrivain sur son lit de mort qu’il se refusera à diffuser. Paul Helleu avait quinze ans lorsqu’il découvrit le mouvement impressionniste. Ces pionniers étaient alors ses aînés et, à leur suite, il apprit à utiliser au mieux la couleur et la lumière. Parlant d’Elstir et, par voie de conséquence d'Helleu,  Proust souligne son sens de la métaphore. C’est que Turner n’avait pas laissé indifférent cet artiste passionnément anglophile. Il se rendait souvent à Cowes, dans l’île de Wight, à bord de l’un de ses cinq voiliers qui furent successivement amarrés dans le port de Deauville. Il était également le peintre des femmes, et tout particulièrement de la sienne - qui était une véritable beauté, poétesse à ses heures sous le nom de Alice Louis-Guérin -  femmes auxquelles il prêtait un caractère inaccessible, préservant leur mystère et sachant rendre palpable leur grâce et leur distinction. La plupart d’entre elles appartenaient à la société du noble faubourg, ce qui eut l’avantage de lui assurer très vite une incontestable notoriété. Curieuse coïncidence, la petite fille d’Arthur Baignières, Françoise, épousera le fils de Paul Helleu, Jean, peintre de marine en 1924. Ils auront trois enfants, dont un fils Jacques, directeur artistique des parfums et de l’horlogerie Chanel -  les journaux, en relatant sa disparition en 2007, ont souligné « qu’une certaine idée de l’élégance disparaissait avec lui » - et une fille Jacqueline, que j’ai eu la chance de connaître parce qu’elle avait un appartement au Parc Cordier et venait souvent rêver devant le manoir. Les admirables Frémonts sont ainsi liés aux Baignières, aux Finaly, aux Helleu et, bien entendu, par l’écriture, à Marcel Proust.

 

«  C’est qu’avec mes amies nous étions quelquefois allés voir Elstir, et le jour où les jeunes filles étaient là, ce qu’il avait montré de préférence c’était quelques croquis d’après de jolies yachtswomen ou bien une esquisse prise sur un hippodrome voisin de Balbec. »

 

Alice Louis-Guérin peinte par son mari Paul Helleu.

Alice Louis-Guérin peinte par son mari Paul Helleu.

 

L’hôtel des Roches-Noires, dans lequel Marcel séjourne avec sa mère durant les étés 1893 et 1894, était à l’époque une sorte de palace international qui recevait de riches clients anglais et américains, dont certains débarquaient directement du Havre grâce à la longue digue-promenade qui avançait de 600 m dans la mer et sera détruite lors de la guerre de 39/45. Ce palace, situé sur la plage, cherchait à concurrencer les débuts prometteurs de Deauville et de son hôtel de charme «Le Normandy» et n’avait pas lésiné sur le confort  des installations. Madame Proust et son fils occuperont l’appartement 110 du 1er étage. C’est d’ailleurs lors de cet été 1893 que Madame Straus quitte le manoir de la Cour-Brûlée, qu’elle louait à Madame Aubernon, pour prendre possession de son manoir des Mûriers, construit par l’architecte Le Ramet et son parc de cinq hectares où le jardinier Claude Tantou, engagé sur les recommandations de la princesse de Sagan, va créer une roseraie et un jardin de fleurs à couper pour décorer les salons et les chambres, chacune d’elles ayant sa couleur, la bleu, la rose, la mauve, tout en sauvegardant un verger à pommiers qui saupoudre d’une neige immaculée les allées et les gazons au mois de mai. Ces vacances passées auprès de ses amis Straus et Finaly laisseront au jeune Marcel un souvenir inoubliable. On s’attardait volontiers à bavarder sous les tonnelles où couraient les ampélopsis et le chèvrefeuille, tandis que Madame Straus, bien campée sur son trône en rotin, bavardait avec Edgar Degas et Anna de Noailles, Guy de Maupassant et Abel Hermant, Léon Delafosse et Charles Haas. Cette femme occupe dans la vie de Marcel Proust une place très importante. Il en est amoureux à la façon dont il est amoureux des femmes. Fille du compositeur Fromentin Halévy, veuve de Georges Bizet, mère de Jacques qui dirigera la compagnie des taxis Unic à Cabourg, elle a épousé en secondes noces l’avocat Emile Straus, homme riche et influant. Personnage de roman, follement narcissique et passablement neurasthénique, Geneviève tient un salon très prisé, où se rendent les Rothschild, la comtesse de Chevigné, Lucien Guitry et Réjane, la comtesse Potocka, la duchesse de Richelieu, Degas, Jules Lemaître, Paul Bourget, autant de gens à particules que d’artistes, et qu’elle animait de son intelligence acérée et de ses mots d’esprit que son mari, très fier d’elle, prenait plaisir à propager à la ronde et dont on retrouvera bon nombre d’entre eux dans la bouche de Mme Verdurin ou de la duchesse de Guermantes. Proust la vénère et aura avec elle une correspondance suivie jusqu’à sa mort. En elle- dit-il – il retrouve tout ce qu’il peut aimer chez une femme : l’esprit, l’élégance, le charme, l’affection et l’allure maternelle et ce qu’il faut dans l’attitude et le comportement de subtile mélancolie.

 

Durant l’été 1894, Proust s’ennuie et écrit des lettres enflammées à Reynaldo Hahn. Il a fait récemment sa connaissance chez Madeleine Lemaire dans son petit hôtel du 35, rue Monceau, et il le supplie de venir le rejoindre aux Roches-Noires dès que sa mère sera partie, appelée par ses devoirs de maîtresse de maison à Paris, de même qu’il rédige un texte  «La mort de Baldassare Silvande», dont il avoue être assez fier. «Je suis à une grande chose que je crois assez bien» - lui écrit-il. Le paysage, dans lequel se déroule l’histoire, est celui qu’il aime par-dessus tout, la mer mauve surprise à travers les pommiers, et les sujets, qu’il développe, ceux déjà récurrents du baiser maternel, de la ressouvenance que cause le son lointain des cloches du village et le sentiment de culpabilité éprouvé par le héros, qui n’a pas été en mesure de satisfaire les aspirations de ses parents, parce qu’il a préféré les plaisirs interdits et ceux de la vie mondaine aux exigences d’une vocation littéraire. Pour toutes ces raisons, Baldassare sera puni de mort.

 

En attendant de publier la nouvelle qui ouvrira « Les plaisirs et les jours», Proust réitère ses appels au secours auprès de Reynaldo : « Comme maman partira bientôt, vous pourrez venir après son départ pour me consoler». Hahn ne répondra pas à cette invitation pour des raisons qui nous sont inconnues. Si bien que Marcel n’aura plus qu’une hâte : regagner Paris à son tour. Durant l’hiver, la relation entre les deux hommes va s’intensifier au point que l’été 1895 les verra réunis en Bretagne à écouter le chant de la mer et du vent. En 1906, ses parents étant morts l’un et l’autre, sa santé n’ayant cessé de se détériorer, Marcel cherche un lieu de villégiature pour se reposer loin des astreintes de la capitale. Son choix s’avère difficile malgré les bons offices et conseils de ses amis, dont sa chère Geneviève Straus qui continue à apprécier les agréments de son Clos des Mûriers dès que l’été fait son apparition. Proust envisage d’abord Trouville, qu’il aime tant, mais s’inquiète de savoir si le chalet d’Harcourt  ou la tour Malakoff sont à louer ; il a même pensé acquérir un petit bateau pour longer le littoral normand, puis breton, mais renonce les uns après les autres à ces projets, épuisé par les soucis de son déménagement boulevard Haussmann. Plutôt que Trouville ou le bateau, ce sera l’hôtel des Réservoirs à Versailles.

 

Certes Proust a aimé Trouville et on ne peut en douter lorsqu’on s’aperçoit qu’il n’y a pas moins de 147 mentions de la cité balnéaire dans la correspondance de Proust réunie par Philip Kolb et pas moins de 14 noms de lieux attachés à cette ville comme le chalet d’Harcourt, la Chaumière, la Villa persane construite en 1859 par Monsieur de Gastine et acheté en 1876 par la princesse de Sagan qui aurait inspiré à l’écrivain la princesse de Luxembourg, les chalets Crémieux, l’église Bon-Secours ou la Villa Saint-Jean, sans oublier le manoir des Roches à l’allure faussement médiévale où séjournait la marquise de Gallifet et qui fut démoli en 1974 après avoir appartenu à Fernand Moureaux, maire et bienfaiteur de la ville. Dans son souci de revenir à Trouville, Marcel écrit ceci à Geneviève Straus :

 

« Au point de vue de Trouville il serait possible que je me décide à louer avec des amis très bons pour moi près de Cabourg pour le mois d’août. C’est très incertain mais néanmoins dès que je saurai le nom de la propriété possible je me permettrai de vous l’écrire pour que vous puissiez demander à un agent de location de Trouville s’il sait ce que c’est, si c’est bien, sain, etc. Mais si je renonce à ce projet je pourrais peut-être venir à Trouville même seul alors, avec ma cuisinière. Savez-vous si le chalet d’Harcourt (le petit chalet des Creuniers) est à louer, si il n’est pas dangereux d’habiter dans un endroit si isolé, si c’est assez solide pour qu’on ne sente pas le vent et les courants d’air dans les chambres. Il faudrait aussi qu’on ne le louât pas plus de 1 000 francs pour août, car déjà cela m’obligerait à automobile etc. et tout cela constituerait une folie que je serai ravi de faire pour Trouville mais qui ne doit pas dépasser certaines limites. J’avais aussi pensé à louer un petit bateau pour moi seul. » Et il ajoute dans la lettre suivante :

 

«  Le modern style est le type de ce qu’il me faut pour bien respirer. Je n’ai  besoin que de ma chambre de maître, deux chambres de domestiques, une salle à manger, une cuisine. Le chalet d’Harcourt tel que je me le rappelle si on ne court le risque ni d’être assassiné, ni d’être emporté par le vent, ni que le vent circule en liberté dans les chambres me plaît beaucoup sur plan, s’il n’y a pas de risques d’éboulement. En général tout ce que je trouve joli, normand, enfoui sous le chèvrefeuille, n’est pas fameux pour moi. »

 

Ces projets ne se réaliseront pas et ce n’est qu’en 1907 que l’écrivain renoue avec sa chère Normandie et jette son dévolu sur Cabourg et le Grand-Hôtel qui vient d’être rénové et que l’on décrit comme un palais des mille et une nuits, disposant d’aménagements particulièrement raffinés, et à la pointe du confort le plus moderne avec ascenseur. D’ailleurs la station ne commence-t-elle pas à concurrencer le prestige de Trouville ? On sait qu’il viendra à Cabourg chacun des étés suivants jusqu’en 1914 et qu’il écrira une partie de « La Recherche » dans l’une des chambres qu’il a occupée successivement à l’étage supérieur pour ne pas être gêné par les voisins du dessus. Trouville, il ne s’y rendra plus qu’occasionnellement, en taxi, pour visiter Robert de Billy ou Geneviève Straus. Mais très vite leurs rendez-vous s’effectueront à mi-parcours et Trouville sera à jamais circonscrit dans sa mémoire, avant d’être transposé dans son œuvre. N’écrivait-il pas en 1917 à Geneviève Straus :
 

« En dictant votre adresse, le nom de votre demeure m’émeut presque autant que le vôtre. Aucune campagne n’est perméable, poreuse, n’a un charme féminin comme la campagne normande. Et toutes les routes, où nous nous sommes promenés ensemble, en voiture et à pied sont des annexes de vous, aussi chères à mon souvenir, aussi incorporées à mon cœur. Mais plus que tout naturellement les maisons que vous avez là-bas habitées, le manoir de la Cour-Brûlée, dont le nom, d’un romantisme Aubernon, fut inscrit par vous sur les cartes roses des Trois Quartiers, mais surtout celle qui fut créée par vous, par Mr Straus, que me ferment ma santé, les distances, et dont je voudrais bien pourtant une fois avant de mourir retrouver, fût-ce pour une heure, le sésame. Celui-ci (il s’agit de l’exemplaire dédicacé de « Sésame et les lys » de Ruskin traduit par Proust) plus heureux verra la pelouse inclinée, s’imprégnera du parfum des roses  d’automne, et sera reçu par vos mains si belles ».

Pour Marcel Proust, en effet, rien ne disparaissait, rien ne s’effaçait, tout se recomposait. C’est cette faculté de reconstitution, de réappropriation qui a produit le miracle de « A la recherche du temps perdu ».

Armelle BARGUILLET HAUTELOIRE


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L'hôtel des Roches-Noires peint par Monet.

L'hôtel des Roches-Noires peint par Monet.

Il fut construit en 1866 par l’architecte Alphonse Nicolas Crépinet et inauguré le 15 juillet 1866, très vite considéré comme l’un des palaces les plus modernes et confortables du second Empire et rénové et 1924 par l’architecte Robert Mallet-Stevens qui re-décore entièrement le hall d’entrée. Réquisitionné durant la Seconde guerre mondiale par les forces armées françaises comme hôpital, puis occupé par l’armée allemande, il est néanmoins remis en activité hôtelière en 1959 mais sans grand succès, puis vendu sous forme d’appartements privés tel qu’il est, hélas ! - aujourd’hui encore. Marguerite Duras, amoureuse de Trouville, acquiert en 1963 l’appartement N° 105 où elle résidera chaque été jusqu’à sa mort en 1996. Le prix Marguerite Duras est remis chaque mois d’octobre depuis 2001 dans le hall de l’hôtel.

 

La villa persane bâtie en 1859 pour Monsieur de Gastine et vendue au prince Hélie de Talleyrand-Périgord, prince de Sagan.

La villa persane bâtie en 1859 pour Monsieur de Gastine et vendue au prince Hélie de Talleyrand-Périgord, prince de Sagan.

Villa Montebello.

Villa Montebello.

Construite en 1863 par Célinski pour la comtesse de Montebello, épouse du fils du Maréchal Lannes, comte de Montebello. Délaissée à la mort de celle-ci en 1877, elle n’est habitée qu’occasionnellement pendant 20 ans. A la Belle Epoque, la villa retrouve son activité en même temps que la station balnéaire grâce à la comtesse de le Roydeville,  épouse du fils d’un premier mariage de la défunte comtesse de Montebello. Mais la guerre de 1914 met fin à ses séjours et, désormais, mariée à un allemand, la comtesse est privée de son bien et la villa placée sous séquestre en 1915 et vendue aux enchères en 1921. En 1930, elle sera finalement acquise par la municipalité et accueillera en 1940 les réfugiés du nord de la France, sera occupée ensuite par l’armée allemande, enfin transformée en groupe scolaire à la Libération avant de devenir le musée de la ville en 1972 et inscrite au titre des monuments historiques en 1987.

 

 

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commentaires

M
Un énorme plaisir à lire ce bel article.<br /> Merci.
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J
Merci beaucoup pour cet article qui remémore bien des passages de Proust, de sa vie, de sa correspondance et de la Recherche. Un régal<br /> J’ai relevé un point d’attention / de question : la villégiature du comte Henri Greffulhe et de son épouse Élisabeth n’était pas à Deauville mais à Dieppe, la villa La Case. Leur fille Élaine et son époux Armand de Gramont étaient eux à Bénerville près de Deauville, villa Mon Rêve. Je n’ai pas trouvé de mention d’une éventuelle villa La Garenne dans leurs archives.
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A
C'est possible. Le document, que j'avais lu, parlait de la villa La Garenne mais il s'agit sans doute d'une erreur et que ce serait plutôt la villa de la fille de la comtesse que celle-ci a parfois occupé.
S
Merci beaucoup pour ce passionnant article que j’ai lu avec d’autant plus d’intérêt que j’adore Trouville .
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Y
Passionnant de bout en bout.<br /> Merci Armelle pour cette promenade qui nous offre l'optique proustienne de Trouville à Honfleur.<br /> Nous sommes comme replongés dans le réseau mondain et artistique de La Recherche dont les dernières pages du Temps retrouvé réactive les liens et le vertige des noms et généalogies au moment où ce botin mondain se délite.<br /> Les passages de correspondance, les extraits des Plaisirs et des Jours, de La Recherche mettent si bien l'accent sur la puissance poétique de cette oeuvre si inspirée par l'intelligence de la peinture et de la musique qu'avait son auteur.<br /> Les relations avec les peintres sont mises à jour de façon si précise et passionnante.<br /> Merci pour votre belle écriture et vos subtiles recherches historiques sur le milieu complexe qui entoure Proust, sur l'architecture et la géographie qui l'ont inspiré.
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D
Superbe article
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R
Que de travail préparatoire a dû vous coûter cette remarquable conférence qui nous apprend tellement et tellement de choses : immense MERCI à vous Madame. C'est un plaisir de vous avoir découverte.
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D
Je vous rejoins dans les éloges
P
Passionnant travail. Je vois que Marcel Proust n'a plus de secret pour vous.
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L
Je crois que j'ai cede a un mouvement d'humeur d'un gout douteux. Bravo pour ce beau travail, clair et passionnant. Dans le cadre du manoir, votre conference prenait sa veritable dimension.
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L
220 visiteurs facebook et pas un seul commentaire ! Personne ne sait exprimer son interet, sa satisfaction pour un article qui donne tant de details sur un pan de la vie du jeune Proust, la beaute et l'enthousiasme de ses descriptions, le charme captivant de ces lieux normands. Au secours Marcel, le francais est en train de devenir une langue morte !
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D
Ça vient , ça vient rhooo Loïc ! Le Breton serait négatif rhooo
A
Je connais votre humour, Loïc, mais l'article ne suscite pas de commentaire, bien qu'il en ait eus sur d'autres sites. Ce texte est simplement celui d'une conférence que j'ai donnée récemment dans le cadre du "Cercle proustien de Cabourg-Balbec" sur les lieux mêmes, d'où l'intérêt supplémentaire pour les participants. Le Cercle aime à se promener dans cette campagne normande et les lieux si emblématiques de l'oeuvre de l'écrivain.

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